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Le Télos européen : inventer la démocratie citoyenne et le management participatifIII - Les effets de la démocratie citoyenne

1. La démocratie citoyenne comme stratégie pédagogique

L’efficacité du système dépend cependant de l'aptitude des citoyens à participer. Leur donner la parole suppose en effet qu'ils sachent la prendre : leur attitude et leurs aptitudes constituent un préalable.

LA PARTICIPATION FAIT LE CITOYEN

Les responsabilités entraînent l'aptitude

Si un véritable citoyen se sent responsable de sa patrie, participer constructivement n'est toutefois pas évident. Tout le monde n'en a pas foncièrement les capacités. Rousseau soutenait que « de lui‑même, le peuple veut toujours le bien, mais de lui‑même, il ne le connaît pas toujours ». La formation est donc une clé indispensable : comprenant les enjeux, chacun forme sa propre opinion et la responsabilisation politique du plus grand nombre devient possible.

Mais comment améliorer la compréhension des citoyens si l'on ne connaît pas leur niveau de savoir ? A l'image des grandes écoles ne délivrant de diplôme que lorsque l'étudiant a effectué des stages sur le terrain, il est difficile d'apprendre sans faire d'exercices pratiques. L'expérience est indispensable à tout apprentissage. Plongé dans un bain démocratique équilibré le contraignant au dialogue et à l'écoute active, chaque personne s'adapte au système qui l'environne. Ayant la possibilité de s’exprimer et se sachant entendu, son attitude devient plus constructive, sa sensibilisation aux enjeux mûrit et son savoir se développe. Elle s’habitue à chercher l’intérêt général, le bien commun se trouve confronté à la diversité des faits et découvre peu à peu le bon sens, par elle-même.

Comme l’élève révise en vue de l'examen, le citoyen prépare d'autant mieux ses interventions qu'elles sont plus entendues. Plus il sera responsabilisé, plus il demandera de lui-même à acquérir de nouvelles connaissances afin de toujours mieux assumer sa responsabilité de prise de parole et d’expression publique. Ainsi, le préalable devient la conséquence : pour que le citoyen apprenne à s'exprimer, il faut lui donner la parole. La maturité des citoyens réside ainsi dans le mode de gouvernement : le système politique doit les responsabiliser.

Chacun doit traiter autrui en adulte. Les psychanalystes de l'enfance savent qu'il faut parler aux nourrissons comme s'ils étaient en mesure de tout comprendre. S'ils n'ont pas la connaissance qui leur permettrait d'intégrer les mots qu'ils entendent, ils en saisissent toutefois la sensation générale. De la même façon, toute organisation doit créer des liens de responsabilité avec ses interlocuteurs. Ainsi, instaurer la démocratie citoyenne revient à responsabiliser intellectuellement toutes les personnes.

L'existence de tribunes entraîne leur nécessité

L’homme s'adapte à son environnement. L'évolution biologique des espèces prouve à quel point nous pouvons muter : les poissons ont su apprendre à respirer, puis à voler... Ne sous-estimons jamais l'influence des contraintes que nous imposons à autrui sur l'évolution de ses comportements.

En permettant la participation à la réflexion en amont des décisions, le système confère de l'importance à ceux qui prennent la parole. Or, quand la capacité d'intervention est réelle, l'inertie n'est pas neutre : chacun sent bien alors que la partie adverse l'emporte par défaut et sans effort dès qu’elle a le champ libre. En conséquence, plus ils sont responsabilisés institutionnellement et savent que leur poids peut faire pencher la balance, plus les citoyens veulent participer. Leur volonté d'intervenir est proportionnelle à leur capacité opératoire : leur aptitude juridique entraîne leur acceptation, puis leur désir de porter une partie du poids. Ainsi, la responsabilisation politique est mère de la responsabilité éthique.

De plus, à mesure qu’ils acquièrent un comportement politique plus responsable, les citoyens veulent légitimement exercer leurs responsabilités en pesant sur le pouvoir. Celui-ci doit alors consentir à accroître encore leur capacité d'intervention. Ainsi, si le système s'entrouvre, le mouvement d'ouverture s'auto-entretient et se poursuit progressivement : plus on l’ouvre, plus il faut l'ouvrir.

Comme tout organe ou composante de pouvoir, les citoyens, mettant le doigt dans l'engrenage, voudront exercer une ascendance toujours plus grande. Auto-motivés, ils se donneront la capacité de toujours mieux comprendre, pour toujours mieux intervenir.

 

LA PARTICIPATION ENTRAINE L'AUTO-DETERMINATION

En construisant des tribunes accessibles à tous, chacun y allant de ses arguments et écoutant les objections, le débat devient plus cohérent. Progressivement, il s'ensuit une prise de conscience générale des préoccupations du long terme.

Les faits, décrits et expliqués par des sources multiples et opposées, sont mieux décortiqués et analysés. Aussi, la barre de machiavélisme à atteindre pour manipuler se place toujours plus haut. En soumettant le citoyen à une multitude d'avis, la démocratie citoyenne le confronte à des informations, à des vérités auxquelles il n’avait pas accès, ou même qu'il refusait de voir, ce qui l’aide à sortir progressivement de son incompréhension, et même de sa naïveté. A l'image des dictatures de l'Est européen, tombées du fait des voies de communication qu'elles ne parvenaient plus à maîtriser, la crédulité fait progressivement place à la circonspection grâce aux nouveaux outils de télécommunication, incomparables pour la participation.

 

Les conditions sont alors réunies pour que chacun puisse contribuer à chercher et appliquer les meilleures solutions. Ainsi, la constitution d'un système qui permet une véritable participation a pour conséquence directe la responsabilisation des personnes à l'amélioration de l'ensemble de la société.

Mais les implications indirectes sont plus positives encore : en donnant au citoyen les moyens de peser sur les décisions publiques, fondamentales pour son propre avenir, lui permettant de prendre en charge son environnement, la participation politique lui fait réaliser que sa propre vie dépend de lui. Ainsi, son comportement personnel évolue, et à mesure qu’il acquiert la faculté d’assumer plus complètement ses rôles économiques et sociaux, il devient également plus responsable dans sa vie professionnelle et privée, et donc plus maître de son propre destin.

Sa responsabilisation systémique fait du citoyen un homme libre. Inversement, sa déresponsabilisation politique le met en situation de dépendance et de soumission dans toutes les sphères de sa vie, y compris professionnelle, sociale et même personnelle.

 

 

Le Télos européen : inventer la démocratie citoyenne

 

 

 

08/07/2016
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